Suite à une note de la DGSI indiquant que M.G inciterait sur ses réseaux sociaux à la lutte contre le Djihâd Armé, le parquet national antiterroriste ouvre une enquête pour « Association de malfateurs en vue de commettre un crime, en l’espèce des meurtres de nature terroriste, et apologie du terrorisme ». M.X 19 ans, a été condamné pour des faits similaires commis alors qu’il avait 15 ans.
Suite à l’enquête au cours de laquelle M.X, assisté par mes soins en garde à vue, se tait, les enquêteurs de la Brigade anti criminalité organisée de Lyon concluent qu’il n’y a « aucune photo, aucune vidéo ni aucun élément ne relevant des infractions poursuivies ». Fin de l’histoire ? Pas si simple dans un dossier où la peur domine.
La deuxième mi-temps sera en double teinte.
Déferrement devant le Juge d’Instruction, ou celui qui est en charge du dossier est absent : nous aurons donc à convaincre de l’absence d’indices graves ou concordants devant un Juge remplaçant, pour qui l’hésitation poussant à la précaution sera donc d’autant plus grande. M.X parle pendant l’interrogatoire devant la Juridiction, je rappelle les mesures exceptionnelles de suivi judiciaire dont M.X fait l’objet, et sa réinsertion en cours; M.X étant sorti de détention il y a quelques mois seulement.
Puis nous sommes invités à nous retirer pour que le Juge reprenne l’analyse du dossier avant sa décision, fait exceptionnel nous d’incitant à l’espérance d’un placement sous statut de témoin assisté … qui sera de courte durée : la mise en examen est actée, au motif que « finalement, je considère que la note de la DGSI se suffit à elle-même ». Saisine du Juge d’Instruction pour un placement en détention provisoire.
A quoi nos institutions servent-elles si une note de la DGSI, bien que démentie par l’enquête, suffit ? A quoi les services spécialisés de déradicalisation servent-ils si, lorsque ceux-ci prônent la liberté en vue de la réinsertion, on enferme à la va-vite pour des infractions sans indices actuels ? Quelles limites avec le fait de donner directement le pouvoir au gouvernement d’empêcher toute personne dont l’usage de sa liberté d’expression ne lui convient pas ?
Devant le Juge des Libertés et de la Détention, et malgré le rappel de « l’inquiétude » du Ministère Public, je rappelle en outre les nécessités impératives, surtout dans la lutte antiterroriste et contrairement à la politique actuelle, de permettre la restauration de la personne et, à ce titre, d’une justice exigeante vis à vis des libertés et laissant, sans naïveté, la confiance d’une possible réinsertion lorsque cette dernière est objectivement en cours.
M.X sort sous contrôle judiciaire.
Demi-victoire au cordeau.
Une complète serait l’annulation de la mise en examen.
A suivre …